Bruno LE MAIRE
Ancien Ministre et Écrivain
Au cours d’une discussion particulièrement riche avec Guillaume Pfister, Bruno Le Maire, ancien ministre et écrivain, a partagé avec les membres et amis d’Aspen son goût pour les arts et la littérature, le désir de liberté et leur influence sur sa carrière professionnelle.
Né le 15 avril à Neuilly-sur-Seine, Bruno Le Maire est un homme politique et écrivain français. Il intègre l’école Normale Supérieure en 1989, où il étudie les lettres modernes, avant de poursuivre à l’Institut d’Études Politiques, dont il sort diplômé en 1996. Sa carrière politique débute en 2002 comme conseiller de Dominique de Villepin. En 2007, Bruno Le Maire est élu député de l’Eure. De 2009 à 2012, il occupe le poste de ministre de l’Agriculture. En 2017, il est nommé Ministre de l’économie et des Finances par le président Emmanuel Macron, fonction qu’il exerce jusqu’en 2024. Durant son mandat, il aura à cœur de conduire une politique de l’offre et aura à affronter des défis majeurs comme la gestion des conséquences économiques de la pandémie de COVID-19 et de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Parmi ses ouvrages, Le Ministre (2004) et Des hommes d’État (2008) lui valent une reconnaissance particulière, ce dernier recevant le prix de littérature politique Edgar Faure. En 2023, il publie “Fugue américaine”, un roman consacré à la vie exceptionnelle du pianiste Vladimir Horowitz.
“La littérature précède le politique”
Lors de cette réunion, Bruno Le Maire a exprimé sa conviction selon laquelle la littérature joue un rôle fondamental et structurant dans la vie politique française. Il a rappelé son propre parcours académique et souligne l’importance de l’École Normale Supérieure face à des institutions telles que l’ENA. Il souhaitait ainsi que l’aspect essentiel de la culture littéraire dans la formation des élites françaises. À ses yeux, la France est la seule grande nation véritablement littéraire, où la création artistique s’entrelace profondément avec la réflexion politique. Il a comparé cette particularité avec l’Allemagne, où, selon lui, les responsables politiques ne s’autorisent pas à écrire de romans, contrairement à la France où cette démarche est possible et même valorisée.
Citant des figures emblématiques comme Saint-Simon, Chateaubriand et Houellebecq, Bruno Le Maire a insisté sur l’idée que politique et littérature marchent de pair, et que cette relation est au cœur de l’identité culturelle et politique française. Pour lui, Saint-Simon incarne cette quintessence : il estime que l’on ne peut saisir les dynamiques de la politique française actuelle sans s’immerger dans les écrits des grands auteurs qui l’ont façonnée. Afin d’illustrer son propos, il a lu un extrait de Saint-Simon, démontrant ainsi comment la politique française reste imprégnée de culture littéraire. Ce lien profond témoigne de l’influence durable des œuvres littéraires sur les idées, les discours et les pratiques politiques dans le pays.
Littérature et compréhension des nations
Bruno Le Maire a poursuivi son intervention en affirmant qu’il est impossible de comprendre l’essence d’une nation sans se plonger dans les œuvres de ses grands auteurs. Il a cité des figures telles que Virginia Woolf pour saisir l’âme de la Grande-Bretagne, James Baldwin pour appréhender la question du racisme aux États-Unis, ou encore Tolstoï et Dostoïevski pour pénétrer l’esprit de la Russie. Selon lui, la littérature ne se limite pas à raconter une histoire, elle donne accès à une vision intime et profonde des réalités sociales, culturelles et politiques.
Il a également souligné l’importance de la fermeté française face aux atteintes à la liberté d’expression et a évoqué l’arrestation en Algérie de l’écrivain Boualem Sansal comme une menace qui doit être fermement condamnée. Pour lui, cet événement rappelle à la France son rôle de défenseur des libertés intellectuelles et culturelles.
Dans une perspective plus large, Bruno Le Maire a appelé l’Europe à se « reconstituer en Empire pacifique », capable de rivaliser avec les grandes puissances mondiales, notamment sur le plan culturel. Il a insisté sur le fait que la littérature française, caractérisée par son sens du détail, comme des peintures saisissantes ou des fresques narratives, doit retrouver une place prépondérante dans le paysage culturel mondial.
Pour illustrer son propos, il a lu un poème de Peter Handke, Lorsque l’enfant était enfant, mettant en lumière la capacité de la littérature à éveiller des sentiments universels tout en nourrissant une identité collective. Il a conclu en appelant la France à réinvestir pleinement le champ culturel, non seulement comme une force douce mais comme un levier de puissance et d’influence internationale.
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