Enrico LETTA

Enrico Letta, ancien président du Conseil des Ministres italien, et auteur du rapport remarqué “Much more than a market”, a partagé avec les membres et les invités d’Aspen ses analyses et ses réflexions sur l’avenir du marché unique, ses limites et son potentiel… encore largement inexploité.

Né à Pise en 1966, Enrico Letta est diplômé de l’université de Pise en droit international, il est titulaire d’un doctorat en droit des communautés européennes de l’École supérieure Saint‐Anne de Pise. Il a été successivement ministre des Affaires européennes de 1998 à 1999 (plus jeune ministre de l’histoire de la République italienne, chargé à 32 ans des politiques communautaires), ministre de l’industrie et du commerce extérieur de 1999 à 2001, député au Parlement européen (2004‐2006), puis Président du Conseil des Ministres d’avril 2013 à février 2014. Parfaitement francophone et polyglotte, Enrico Letta, européen convaincu, a cofondé en 2003 le think tank EuropaNova dont il a assuré la présidence du conseil scientifique jusqu’en 2010. Il enseigne depuis 2014 à Sciences Po Paris et a occupé le poste de doyen de l’Ecole des affaires internationales (Paris School of International Affairs – PSIA) de 2015 à 2022. Il est l’auteur de nombreux ouvrages sur l’Europe, dont “Andare Insieme, andare lontano” (Aller loin, ensemble, 2015), L’Euro : une utopie trahie ? (2017), “Molto più di un mercato” (Des idées nouvelles pour l’Europe, 2024).

Enrico Letta plaide pour un agenda de résistance face aux pressions américaines et pour une révision du modèle financier européen. Selon lui, le modèle de financement de la défense européenne est encore trop dépendant de l’achat d’équipements militaires hors de l’UE (notamment aux Etats-Unis). Dans le cas de la guerre en Ukraine, il est paradoxal que les équipements utilisés par les armées de Zelensky, et financés par l’UE, dépendent du complexe militaro-industriel américain… En outre, il souligne que la dispersion de notre épargne hors UE et le manque de communication entre les industries, notamment de défense, entraînent un manque de compétitivité et entravent les objectifs de plein emploi. Enrico Letta appelle donc à une plus grande autonomie stratégique et à un financement plus solidaire dans un contexte où la défense européenne devient un enjeu de plus en plus central.

Enrico Letta développe également une réflexion plus large sur l’avenir de l’Europe. Il met en garde contre le risque de fragmentation de l’Union européenne face à l’impérialisme des États-Unis et de la Chine, et plaide pour une refondation de l’intégration européenne. Il évoque notamment la nécessité de renforcer le marché unique, qui reste, selon lui, l’élément clé de la prospérité européenne. Dans cette optique, il plaide en faveur d’un « Code européen des affaires », un cadre juridique unifié permettant de simplifier et de renforcer le marché unique, en surmontant les réglementations nationales qui entravent la fluidité des échanges économiques. Cette intégration renforcée devrait permettre à l’Europe de peser davantage dans les domaines de l’innovation, de l’énergie et des télécommunications, afin de ne pas devenir une “colonie des grandes puissances”.