En cette fin d’année 2022 l’institut Aspen a invité le politologue Gilles Kepel, ancien spécialiste du Moyen-Orient, pour nous parler de son livre récemment publié chez Gallimard “Enfant de Bohème”. 

En 1974, suite à un voyage en Syrie qui fait office d’épiphanie, Gilles Kepel s’inscrit au cours d’arabe à la faculté de Censier et poursuit un double diplôme avec l’Institut français de Damas et Sciences Po. Il rejoint ensuite le Centre d’études et de documentation économiques, juridiques et sociales du Caire afin d’y réaliser sa thèse de doctorat sur les mouvements islamistes contemporains. De cette thèse sera tiré son premier livre, Le Prophète et Pharaon (1984), qui constitue encore aujourd’hui une référence. Gilles KEPEL se tourne ensuite vers la recherche et les enquêtes de terrain autour de l’Islam. Il dirige des recherches au sein du CNRS et de Sciences Po où il fonde le Campus Moyen-Orient Méditerranée. Auteur d’une vingtaine de livres mélangeant analyses et enquêtes, Gilles KEPEL est l’un des plus grands spécialistes de l’Islam. On lui doit notamment Passion arabe (Gallimard, 2013), À l’ouest d’Allah (Seuil, 1994) ou encore La Fracture (Gallimard/France Culture, 2016).

Pour son entrée en littérature, le politologue Gilles Kepel se penche sur la question des origines, à travers une épopée familiale fantasque et humoristique, au milieu d’une « Europe folle » et ravagée par les guerres. Si le récit, aux allures kafkaïennes, lui aussi originaire de Bohême, se présente comme une adresse au père, Milan, dramaturge volage et tourmenté, c’est bien le grand-père de l’auteur, Rodolphe K., qui en est le héros. 

Ce francophile patenté, et nationaliste fervent, arrive à Paris au début du siècle dernier. Très vite, ce dernier se fait un nom dans les cercles artistiques parisiens ; il traduit en tchèque les oeuvres d’Apollinaire et lance La Nation Tchèque, premier périodique revendiquant la lutte de libération nationale. Au fil de ces pages, c’est un Gilles Kepel insoupçonné qui transparaît. Qui aurait cru que ce grand spécialiste de l’Islam était si pénétré de l’esprit Tchèque ?