L’Europe en tenailles entre les Etats Unis et la Chine

 

Olivier BLANCHARD

L’institut Aspen France, en collaboration avec Alix Partners, a accueilli Olivier Blanchard le 2 avril pour une discussion autour de sujets géo-économiques. L’Ancien économiste en chef du Fonds Monétaire International a partagé son expérience et ses réflexions sur ces grands enjeux, autour d’une trentaine de participants. 

 

Né en 1948, Olivier Blanchard est un économiste renommé. Ses études ont enrichi la recherche macroéconomique notamment sur le rôle de la politique monétaire, la nature des bulles spéculatives et du marché du travail.   Titulaire d’un doctorat en économie du Massachusetts Institute of Technology (MIT), il a été professeur à l’université de Harvard jusqu’en 1983, année où il commence à enseigner au MIT.   Entre 1998 et 2003, M. Blanchard  devient président du département d’économie du MIT. Il occupe ensuite de 2008 à 2015 le poste d’économiste en chef du Fonds monétaire international. Il est désormais professeur émérite “Robert Solow”.  Olivier Blanchard, membre de l’Econometric Society, ancien vice-président de l’American Economic Association et membre de l’American Academy of Sciences, a été rédacteur en chef du Quarterly Journal of Economics et du NBER Macroeconomics Annual.

 

Evolution de l’économie mondiale :  un passage à la loi du plus fort

Olivier Blanchard a commencé son intervention en évoquant une économie mondiale en pleine mutation. En effet, il explique le passage progressif d’un système de règles instauré par l’accord de Bretton Woods à une logique dominée par la loi du plus fort. Dans ce nouveau contexte, la confiance entre les nations s’effondre et un monde multipolaire émerge, avec les États-Unis qui se positionnent en grands patrons et la Chine jouant un rôle clé. Cette transition marque un changement radical dans les relations économiques internationales. L’une des manifestations les plus frappantes de cette évolution est la montée des guerres tarifaires, à l’image des nouvelles taxes douanières annoncées par Trump aujourd’hui, jour qualifié de “Liberation Day”. 

 

L’incertitude et les conséquences sur les investissements

L’une des conséquences les plus marquées de ces politiques tarifaires est l’incertitude qui pèse sur les investissements à l’échelle mondiale. Les entreprises sont confrontées à la question de savoir si ces tarifs sont temporaires ou s’ils perdurent, ce qui complique la prise de décision et ralentit les investissements. Cette incertitude est d’autant plus marquée dans les pays les plus vulnérables, qui se retrouvent directement affectés par la fluctuation des tarifs. 

Comment réapprendre à faire société et à reconstruire un lien social qui soit fondé sur un imaginaire partagé ? La crise de la culture est-elle irréversible ? Enfin, comment retrouver un collectif et réapprendre à accepter nos différences, sans les réduire à des images grossières et stéréotypées ?

 

Que devrait faire l’Europe ? 

L’Europe, confrontée à la guerre tarifaire en cours, doit définir une réponse stratégique adaptée. Selon Olivier Blanchard, la réaction européenne dépendra des intentions de Trump et de sa réaction aux contre-mesures. Si l’objectif est de faire pression sur les États-Unis, l’Europe pourrait envisager des mesures comme la restriction des exportations ou l’utilisation d’instruments de coercition.Toutefois, si le Président Trump persiste dans ses positions, il serait préférable pour l’Europe de ne pas répondre de manière excessive. En revanche, la grande crainte demeure dans une escalade des tarifs, où de nombreux pays, tels que le Mexique ou le Vietnam, pourraient être de plus en plus soumis à des droits de douane. L’Europe, dans ce contexte, doit naviguer prudemment pour éviter un conflit direct avec la Chine, en maintenant ses liens avec le pays, tout en cherchant des partenaires extérieurs, tel que le Canada. Les enjeux sont multiples : il s’agit de défendre les intérêts européens tout en limitant les tensions mondiales.

Olivier Blanchard conclut son intervention en soulignant que l’incertitude planant sur l’économie mondiale, exacerbée par les guerres tarifaires et la montée des tensions, rend l’avenir du commerce international difficile à anticiper. Le FMI demeure un acteur essentiel pour réguler les relations économiques et maintenir une certaine stabilité. La question de l’autonomie stratégique, notamment en matière de chaînes d’approvisionnement, devient primordiale. L’Europe doit se préparer à défendre ses intérêts sans dépendre exclusivement des autres puissances, et cela inclut une réorganisation de ses structures de défense, tant économiques que militaires.