Capitalisme, croissance et égalité des chances : triangle impossible ?
Yann COATANLEM
Yann Coatanlem a été invité par l’Institut Aspen France afin d’échanger autour de son livre “Capitalisme contre les inégalités” dans lequel il défend un capitalisme plus social.
Yann Coatanlem, est un économiste et un dirigeant d’entreprise français. Il est le président du think tank franco-américain Club Praxis, où il a contribué à l’ouverture des données publiques dans le domaine social et fiscal. Il est aujourd’hui Directeur général de DataCore Innovations, une start-up de FinTech spécialisée dans les produits financiers « antifragiles » et ESG. En 2023, il a obtenu le 36ème Prix Turgot avec Antonio de Lecea pour leur livre Le Capitalisme contre les Inégalités, qui a également reçu le Prix Louis Marin de l’Académie des Sciences Morales et Politiques. En 2018, il a reçu le Prix spécial de l’Académie des sciences morales et politiques pour son livre Le Gouvernement des citoyens et l’ensemble des travaux du Club Praxis. La même année, il a été récompensé de la Médaille d’Or de la Renaissance Française. L‘Institut de France a aussi récompensé Le Capitalisme contre les inégalités du Prix Louis Marin en 2022.
Plus d’équité pour plus de croissance ?
Plusieurs études ont analysé le rôle de l’équité dans la croissance économique. Dans le cas de l’intégration des noirs américains, il a été prouvé que de meilleurs salaires, diplômes, accès au logement et indice de capacité d’investissement pourraient conduire à une augmentation du PIB étasunien de mille milliards de dollars par an (5 % du PIB). McKinsey a mené un travail similaire dans le secteur spécifique de l’industrie cinématographique : si cette industrie était plus inclusive, elle pourrait générer jusqu’à dix milliards de dollars de plus chaque année (7 % du chiffre d’affaires actuel). Les travaux de James Heckman ont également montré que l’investissement dans l’aide à la petite enfance (développer l’attention, la concentration et la curiosité des élèves) pouvait générer des bénéfices quantifiés à 15 % par an et par personne.
Une meilleure fiscalité pour une meilleure aide sociale ?
La concentration extrême des richesses doit motiver une réforme des institutions de régulation et une révision du droit de la concurrence. Qu’en est-il de la réforme de la fiscalité ? La question de la taxation des plus riches a imprégné le débat sur les inégalités. Or elle est ambiguë : on mélange la question du niveau de l’imposition et celle de sa structure. L’aide sociale est la symétrique de la taxation, mais il y a un manque de cadrage suffisamment précis de ces aides, notamment celles d’urgence en cas de crise. Cela conduit à un accroissement des déficits publics. Ces risques pourraient être atténués avec une meilleure approche en amont et des mesures préventives. Le revenu universel pourrait jouer ce rôle d’amortisseur avec l’avantage d’un changement de la psychologie des populations et d’une réduction des aides sociales existantes, parfois désavantageuses et stigmatisantes.